Il est de ces joueurs touchés par la grâce, par les Dieux du rugby, au talent immense bien que par moment sous-côté. Si bien qu'il a une nouvelle fois enflammé la pelouse de Jean Bouin ce dimanche soir, comme pour prouver une fois de plus l'étendue de son talent à ceux qui pouvaient encore émettre une once de doute. Alors dos au mur, menés largement par La Rochelle (6-20), les Parisiens s'en sont remis à leurs recettes miracle. Une mêlée dominatrice et un Waisea Nayacalevu de gala. En l'espace de 3 petites minutes, la face de la rencontre a totalement changé. Un lancement de jeu tout simple, une sautée 10-13 qui envoie le centre fidjien derrière les barres, la faute il est vrai, à une défense maritime apathique. Le deuxième en revanche, résulte d'un magnifique mouvement collectif, avec une passe sublime d'Alex Arrate, suivi de l'excellent relais d'Antoine Burban qui servira l'inévitable Waisea, qui pointera dans l'en-but. Élément incontournable depuis bientôt une dizaine d'années au club, devenu un cadre sur et en dehors des prés, Waisea est-il l'un des meilleurs joueurs de l'histoire du Stade Français ? Poussons même la question plus loin. Est-il le plus grand centre que le club ait connu dans son histoire ?
VIDÉO. Top 14. Au forceps, Waisea et le Stade Français battent La Rochelle et se donnent de l'air !
En 2012, le Stade Français vit des moments compliqués. Le club de la capitale semble s'essouffler et ne paraît plus en mesure de lutter pour la qualification. Pour le prochain exercice, la direction s'est offert les services d'un Fidjien inconnu au bataillon, au nom imprononçable. Waisea Nayacalevu Vuidravuwalu. Que sait-on de ce jeune îlien alors âgé d'à peine 22 ans ? À vrai dire, pas grand-chose, ce qui ne manque pas d'éveiller notre curiosité. À l'époque, Waisea évolue au Melbourne RFU, un club australien et fait quelques apparitions avec la sélection fidjienne à 7. Une vidéo Youtube nous fait rapidement part de ses qualités. L'ailier est puissant, doté d'une belle vitesse de pointe. Mais il semble survoler un championnat australien bien loin de son niveau. Il collectionne les essais au sein de l'île-continent, ce qui ne manque pas de frapper dans le viseur des recruteurs parisiens. Une sorte de pari, qui s'avèrera être gagnant.
Top 14. VIDÉO. Waisea voit double et le Stade Français décolle de la lanterne rouge
Dès le début, quelque chose laisse envisager de grandes promesses. Outre ses qualités de vitesse, il semble dégager une certaine facilité balle en main. Sa première en tant que titulaire à Clermont va immédiatement donner le ton. Pas favori face à l'un des ogres du championnat, les Parisiens, dans le sillage de leur bombe fidjienne vont frôler l'exploit. Dès la première minute, Waisea break la défense auvergnate. Sa course folle se poursuit avec un petit coup de pied par-dessus le dernier rempart local. Il sera finalement repris in extremis. L'action continue, et Paul Warwick plonge en Terre Promise. Un feu de paille ? Que nenni. 20 minutes plus tard, servi sur ses cinquante mètres, il va inscrire son premier essai en Top 14. Et de quelle manière ! D'une aisance déconcertante, il cassera quatre plaquages pour donner à son équipe un avantage conséquent. Avant de doubler la mise à la demi-heure de jeu. Un ballon échappé dans un ruck et Waisea profite de l'aubaine pour ramasser la gonfle et filer à dame. Si le Stade Français s'incline ce jour-là (28-25), cette date du 1er octobre 2012, restera comme celle de la naissance d'une légende du club, de l'avènement d'un jeune joueur, amené à devenir l'une des figures de proue des soldats roses.
Car ce genre de prestation, le solide ailier d'1 mètre 93 pour 105 kilos va s'amuser à les répéter. De là à en faire rapidement un titulaire indiscutable au sein d'une formation qui l'a révélé aux yeux du microcosme de la balle ovale. Dès la saison suivante, il va prendre une place importante dans les rangs stadistes. Les stats parlent pour lui : 15 matchs dont 14 comme titulaire pour 8 essais. Pas mal non ? Mais surtout, jusqu'alors cantonné à l'aile, le staff parisien va peu à peu le décaler au centre. Un poste où le natif de Navua, une ville d'à peine plus de 5000 âmes à l'extrême sud des Fidji, va pleinement exprimer ses qualités. Car si ce dernier épate depuis deux saisons, il va connaître l'apothéose et toucher du doigt le sublime lors de l'exercice 2014/2015. Outre ses 10 essais, il va remporter le Bouclier de Brennus aux termes de phases finales grandioses de la part du Stade Français, qui balayera respectivement le Racing, Toulon et Clermont. Avec Jonathan Danty, il formera une paire de centre complémentaire amenant le Stade Français à décrocher le Graal. Et malgré des sollicitations extérieures au fil des années, notamment de la part de Toulon, le joueur va jurer fidélité au club parisien, et ce, malgré, des saisons parfois moroses, pour ne dire plus.
Un départ malgré tout en juin ?
Lors de la saison 2016/2017, il sera élu meilleur marqueur du Top 14 avec 16 réalisations. Mais pas que, puisqu'il remportera le Challenge Européen, premier titre continental du Stade Français. Cette saison encore, il est l'un des facteurs X de Paris. Et si d'aucuns ne tarissent d'éloges à son sujet, force est de constater que les performances du Fidjien ne datent pas d'hier. Waisea a également pris une autre dimension depuis deux ans avec les Fidji. Il est l'un des hommes de confiance de Vern Cotter. Lors de la dernière tournée automnale, il fut d'ailleurs désigné capitaine. Et le trois-quarts centre a bien rendu la confiance qu'on lui a accordé. Un essai face à l'Espagne mais surtout un doublé à Cardiff face aux Gallois et une activité défensive débordante.
Cette saison encore, il n'est pas rare de le voir sortir le Stade Français de situations précaires. On l'a remarqué face à Clermont ou encore ce dimanche contre La Rochelle. Certes, l'effectif parisien reste compétitif, avec des joueurs de renom. Mais force est de constater qu'il y a un Paris avec et un Paris sans Waisea. Ce qui reste le plus marquant, c'est cette impression de facilité dégagée. En attaque, il paraît en mesure de breaker n'importe quelle défense. Et s'il fut souvent sous-côté, n'ayons pas peur d'employer les superlatifs, le centre du Stade Français est tout simplement stratosphérique offensivement. Et si cet avis reste subjectif, il fait sûrement parti, et ce depuis de nombreuses année,s d'un des tous meilleurs joueurs ballons en mains du rugby mondial, un attaquant hors du commun. Alors on peut déjà l'affirmer : oui Waisea Nayacalevu est l'un des joueurs les plus doués que le Stade Français ait connu, à inscrire au panthéon des légendes du club. Mais est-il le meilleur centre que le Stade Français n'ait jamais eu ?
TRANSFERT. Top 14. Waisea Nayacalevu du Stade Français au Rugby Club Toulonnais ?
Certes, loin de nous l'idée de minimiser les performances des grands centres qui ont porté les couleurs bleues et rouges puis roses. Les Comba, Liebenberg, Glas ou autres ont bien évidemment marquer l'histoire du Stade Français Paris. Cependant, rarement un joueur aura fait si forte impression. Son souci ? Waisea n'aura pas fait partie des années fastes du club. Malgré un titre de champion de France et un Challenge Européen, son aventure au Stade Français fut parfois marquée de moments difficiles sportivement, jouant le mentre mou ou parfois même le maintien dans la sinistrose ambiante. Mais si nous devions donner notre opinion, alors oui, Waisea est sûrement le centre le plus talentueux passé par le club.
Finalement, il se pourrait qu'il ait fini par céder aux sirènes des autres formations. En effet, il y a fort à parier que Waisea rejoigne Toulon l'an prochain. RMC Sport avait lancé la rumeur, qui semble ne plus en être une puisque Canal + a confirmé ces indiscrétions ce dimanche soir. Cela s'avèrerait être une énorme perte pour les pensionnaires du stade Jean Bouin. Car après 9 ans de (très) bons et loyaux services, ce serait une nouvelle page qui se tourne. S'il ne fait pas partie de cette génération de ''titi'' parisien, Waisea a été adopté et est devenu l'une des coqueluches de l'équipe. Malgré quelques petits écarts de conduite hors des près, on pense à cette agression accompagné de Josaia Raisuqe en 2017, il a toujours été irréprochable lorsqu'il s'agissait d'enfiler la tunique rose et de fouler le rectangle vert. Alors si tel est le cas, le joueur de 31 ans aura à n'en pas douter à coeur de soigner sa sortie, de maintenir le club dans l'élite du rugby français dans un premier temps et plus si affinités. En tout cas, pour l'ensemble de votre oeuvre, chapeau monsieur Waisea Nayacalevu.
