« On ne compte plus les personnalités du rugby pro qui, de Henry Chavancy à Chris Masoe en passant par Dan Carter, jugent aujourd’hui que Virimi Vakatawa est le meilleur trois-quarts centre du monde. » Cette tirade illustre si bien l’aura du Franco-Fidjien qu’on a choisi de l’utiliser en préambule de notre papier, quand bien même elle n’est pas de nous mais de notre confrère du Midi Olympique Marc Duzan, spécialiste du Racing 92. Aussi parce qu’elle flirte avec la ligne de vérité. Il faut dire que le numéro 13 de 28 ans marche sur l’eau depuis deux ans : il multiplie les gestes hors du temps, traverse les défenses comme dans du beurre, enfile les essais comme les perles et constitue, in fine, la pierre angulaire des lignes de trois-quarts du club des Hauts-de-Seine comme du XV de France.
C’est d’ailleurs son ancien mentor à Nanterre et actuel entraîneur des trois-quarts en Bleu qui décrivait le mieux l’arme fatale qu’est devenu Vakatawa. « Aucun de ses adversaires ne parvient à décrypter son jeu parce qu’il a mille cordes à son arc : la percussion, le jeu dans le plaquage, la passe aveugle avant contact, l’évitement… Il peut lâcher un ballon dans toutes les situations, mobilise à chaque fois deux à trois défenseurs et autour de lui, crée des espaces : tôt ou tard, les joueurs qui circulent dans sa zone auront des occasions d’essais », décryptait Laurent Labit pour le Midol il y a quelque temps. L’apogée de son rugby est telle ces dernières saisons que Semi Radradra - probablement le meilleur attaquant de la planète aujourd’hui - allait même plus loin le concernant à l’automne dernier : « Je le connais bien. C’est l’un des meilleurs centres au monde à l’heure actuelle, si ce n’est le meilleur de tous. J’adore le voir jouer avec le Racing et la France. Ses performances ces dernières semaines ont été impressionnantes. »
6 Nations 2021. Pas de Vakatawa pour le Tournoi des 6 Nations, absent plusieurs semaines
Et la vie sans « Vaka », alors ? En Bleu, on ne la connaît pas vraiment aujourd’hui, mais toujours est-il que les Tricolores vont devoir faire avec (ou sans) durant tout le Tournoi, on ne vous apprend rien. Le natif de Rangiora s’est en effet blessé au genou face à Bordeaux voilà deux semaines et manquera l’intégralité de la compétition. La tuile pour le XV France, déjà privé de plusieurs cadres comme Romain Ntamack ou François Cros pour ne citer qu’eux, et ce dès samedi face à l’Italie. Mais pour vous situer s’il le fallait encore la pleine importance de Virimi dans ses différentes équipes aujourd’hui, que diriez-vous de jeter un oeil au plan statistique, ce vecteur si cher à Joe la Stat et qui pourtant, comme les bikinis, « donne une idée mais cache le principal » d’après Francis Delteral ?
Toujours est-il que les hommes mentent, mais pas les chiffres. C’est bien simple, depuis 3 saisons et l’avènement de Vakatawa au centre, lorsque l’ancien septiste est sur la pelouse, le Racing s’impose dans quasiment 73% des cas. Contre moins de 61% de manière générale. Sur les 44 titularisations de leur magicien depuis la saison 2018/2019, les Ciels et Blancs l’ont en effet emporté à 32 reprises, alors qu’ils n’ont gagné « que » 45 sur l’intégralité de leurs 73 rencontres (avant Bordeaux) dans le même laps de temps. Etonnant ! Et si les plus fins analystes pourraient arguer que les victoires du Racing lorsque Vakatawa joue sont peut-être également corrélées à d’autres facteurs comme la présence d’une équipe « type » dans la majorité des cas, notez que le maestro a tout de même planté 25 essais sur la période, pour on ne sait combien de passes décisives. Soit un ratio de 0,56 essai par match. A Nanterre depuis lors, personne ne fait mieux à part Teddy Thomas (0,86), qui doit beaucoup à son compère du centre de l’attaque. Quand on sait que « Vaka » est considéré comme un détonateur plutôt qu’un finisseur… CQFD.
L’EDF en Post Scriptum
Voilà...Tout ça pour dire aux plus sceptiques que le rappel sur la corde de Virimi juste avant le Mondial japonais était on ne peut plus légitime, et le fait qu’il truste le maillot floqué du 13 en Bleu depuis lors ne puisse souffrir d’aucune contestation. En somme, depuis son installation au centre en équipe de France, les Bleus se sont imposés 8 fois sur 10. Bien sûr, cela ne pourrait être qu’un trompe-l’oeil tant Vakatawa s’exprime cette fois au milieu d’un collectif qui tourne déjà très bien. Mais il a au passage distribué les timbres à foison, servi de point d’ancrage aux Tricolores, inscrit 4 essais et multiplié les offrandes toutes plus belles les unes que les autres.
En dehors des stats et comme nous l’évoquions en début de papier, nombreux sont ceux qui s’accordent à dire que le funambule francilien est surtout devenu le facteur X de la ligne d’attaque française, autant que son régulateur. En chiffres, les petits Bleus ont néanmoins montré lors de l’Autumn Nations Cup qu’ils étaient capables de s’en sortir sans leur arme fatale venue du Pacifique. Reste à savoir si le XV de France sera capable d’en faire de même lors de ce Tournoi 2021, dans les faits, cette fois…