Le Racing 92 à Lens, le RCT à Marseille ou encore l’Aviron Bayonnais à Saint-Sébastien… Il y a déjà eu sept délocalisations cette saison en Top 14. Si certaines sont de franches réussites (le Stade Toulousain compte deux victoires en autant de matchs au Stadium de Toulouse, ndlr.) d’autres soulèvent des interrogations.
Des défaites qui pourraient coûter cher
L’Aviron Bayonnais n’a pas perdu le moindre match cette saison à Jean-Dauger faisant tomber tous les “gros” du championnat (29-13 contre le Stade Rochelais/26-22 contre le Stade Toulousain…). Le club basque a pris la décision de délocaliser son match face à la Section Paloise au stade d'Anoeta à Saint-Sébastien en Espagne : défaite 20-30. À deux journées des phases finales, Bayonne (8ᵉ avec 54 points) n’est qu’à quatre points de la 6ᵉ place occupée par l’UBB (58 points). Une victoire face à Pau (actuel 12ᵉ) le 25 mars dernier aurait permis à l’Aviron Bayonnais de croire encore plus aux phases finales. Espérons pour eux que ces quatre points laissés en Espagne ne manqueront pas.
Champions Cup. Racing-La Rochelle à Lens : vers un inévitable fiasco ?Comme Bayonne, l’Union Bordeaux-Bègles est en lutte pour les places qualificatives et à l’image du club basque, une délocalisation soldée d’une défaite pourrait laisser un goût amer. Lors de la 21ᵉ journée de Top 14, l’UBB s’incline lourdement face au Stade Rochelais (6-36) au Matmut Atlantique. Au vu du score, les Bordelais n’auraient peut-être pas fait mieux dans leur jardin à Chaban-Delmas. Mais qui sait ? N’importe quel joueur de rugby connaît l’importance de la routine d’avant match. Elle commence souvent le matin du match avec la mise en place, se poursuit au repas (souvent toujours à la même table avec les mêmes coéquipiers) et se termine enfin dans le vestiaire. Chacun a alors sa place, son propre rituel individuel ou collectif. Quoi qu'il en soit, cette préparation est cruciale. Un match à la maison, c’est rassurant. Les joueurs connaissent par cœur le déroulement jusqu’au coup d’envoi. Un avantage non négligeable. La preuve : cette saison, le taux de victoire à domicile est de 73,8% avant la 25ᵉ journée de championnat.
Qu’en est-il des supporters ?
Si le Stade Toulousain ou l’Union Bordeaux-Bègles ont délocalisé leurs matchs chez leurs voisins footballeurs au sein même de leur ville respective, d’autres s’exilent loin de leurs terres. C’est le cas du Racing 92 qui, après avoir battu Bordeaux à Lens 31-28 (Stade Bollaert-Delelis), “recevra” le RCT au Havre (Stade Océane) à plus de 186,8 km de ses bases. Pendant ce temps, c'est Sam Smith qui fera le show dans la salle des Franciliens. Une nouvelle délocalisation qui ne passe pas pour les supporters : “Personnellement, je ne peux pas me déplacer, mais ça tombe plutôt bien. On n'a pas notre identité, on n'a pas de repères, ça me gave. Beaucoup ne suivent pas le rythme et ne pourront pas venir", explique Christophe Baboro, président du groupe de supporters du XV Ciel et Blanc du Plessis-Robinson, interrogé par Eurosport.
Pour Baboro l’inquiétude est d’ordre sportif : “A cette période de la saison avec des matches aussi importants, imaginez qu'on perde… La saison peut être terminée". Le président de son club de cœur, Jacky Lorenzetti, dans un entretien donné au Midol, est très honnête sur la motivation financière de ces délocalisations : “Évidemment que ça fragilise l'équipe. Mais lorsque j'ai entrepris la construction de cette salle de spectacle dans lequel on déroule le tapis pour y disputer parfois des matchs de rugby, je savais que le problème des délocalisations se poserait tôt ou tard. La logique est ici financière, il ne faut pas se le cacher : organiser des matchs de rugby à Paris-La Défense-Arena est difficile et coûteux ; organiser des spectacles est plus facile et beaucoup plus rentable”. Le financier prend malheureusement le pas sur le sportif, et ce, de plus en plus dans le rugby moderne. Certains parviennent à allier les deux comme le fait parfaitement le Stade Toulousain qui a su prendre ses marques au Stadium. Mais on n’est jamais mieux ailleurs que chez soi. Généralement, ces délocalisations sont plutôt source de déconvenue et de tensions avec ses propres supporters qui se sentent délaissés. Afin de contrôler ces délocalisations, la Ligue Nationale de Rugby limite son nombre à quatre par saison (pour les délocalisations de plus de 50 km) depuis 2021.