Personne n'en parle...mais le rugby argentin est face à un vrai risque de régression

[TRANSFERTS] L'Europe, nouvel Eldorado des Pumas : les signatures s'enchaînentOn a beaucoup parlé de l'arrivée massive des joueurs argentins en Europe. Ainsi pas moins de dix internationaux ont quitté leur pays natal pour l'ancien continent. Le Top 14 et la Pro D2 ont accueilli plusieurs Pumas comme Petti (UBB), Kremer (Paris), De la Fuente (USAP), Montagner (Mont-de-Marsan), Mensa (VRDR). La Premiership compte désormais dans ses rangs Creevy (London Irish), Orlando (Newcastle), Alemanno (Gloucester), Moroni (Leicester). On peut aussi ajouter le départ - ou plutôt le retour - du coach Gonzalo Quesada au Stade Français. S'ils ont fait le choix de signer en France et en Angleterre, c'est sur la recommandation de leur Fédération. Celle-là même qui les avait par le passé poussé à revenir au pays pour être sélectionnable en jouant pour les Jaguares. En constante progression depuis leur intégration en 2016, année où ils avaient terminé 13e, ils avaient atteint la finale du Super Rugby l'an dernier. La saison 2020 aurait pu être celle de la confirmation après un bilan de 22 victoires pour 14 défaites lors des deux derniers exercices à défaut de la celle de la consécration. 

Mais la pandémie de coronavirus a contraint la SANZAAR à suspendre la saison. Après des semaines sans jouer, et avec la fermeture des frontières, la Nouvelle-Zélande a lancé son propre Super Rugby, nommé Aotearoa, entre ses cinq franchises. De son côté, l'Australie en a fait de même en réinvitant la Western Force, exclue du championnat de l'hémisphère sud en 2017. Et les autres nations dans tout ça ? L'Afrique du Sud, durement touchée par la Covid-19, n'a pas suivi le mouvement. Il faut dire qu'elle n'avait plus que quatre franchises en lice depuis l'exclusion des Cheetahs et des Kings en même temps que la Western Force. Laissant ainsi de côté les Sunwolves et les Jaguares. Si les Japonais connaissaient leur avenir depuis longtemps, les Argentins avaient imaginé un futur plus radieux. Or, la conjoncture actuelle laisse à penser que le rugby argentin va être le grand perdant de toute cette histoire.Super Rugby : les Sunwolves bientôt exclus de la compétitionLe projet de réduire à nouveau les équipe au sein du Super Rugby était en effet déjà l'étude. En cause notamment : les frais liés aux trop nombreux voyages à travers tout le globe, des matchs difficiles à suivre pour les fans en raison des fuseaux horaires. Le succès du Super Rugby Aotearoa avec des stades bondés a poussé la Nouvelle-Zélande à évoquer la fin du modèle actuel pour revenir à une compétition plus intimiste. En Australie, le Super Rugby AU a commencé lentement mais la qualité des matchs a fait revenir le public. La rivalité australo-néo-zélandaise pourrait être au centre du nouveau championnat. A condition que les voisins de chaque côté de la mer de Tasman s'entendent.

Le Super Rugby au bord d'une révolution après une proposition des Néo-Zélandais

En effet, les Kiwis ont annoncé qu'il n'y avait de place que pour deux voire quatre équipes australiennes. Ouvrant ainsi la porte à une nouvelle franchise du Pacifique comme les Asia Pacific Dragons de Singapour, qui ont récemment participé au Global Rapid Rugby, une sélection fidjienne ou bien une équipe basée à Hawaï. Cette dernière a pris du poids depuis que des anciens All Blacks ont apporté leur soutien financier. Reste que deux formations situées à Auckland auraient aussi montré leur intérêt selon RugbyPass. Mais l'Australie n'a pas dit son dernier mot et posé un ultimatum à la Nouvelle-Zélande au 4 septembre afin que ses cinq franchises fassent partie du projet.Plusieurs anciens All Blacks derrière la création d'une franchise à Hawaï en MLRUne fois de plus, cette nouvelle compétition laisse l'Afrique du Sud et l'Argentine de côté au niveau des clubs. Il se murmure que les franchises sud-africaines, à savoir les Bulls, Lions, Sharks et Stormers, pourraient regarder vers l'hémisphère nord et rejoindre la Pro 14 où évoluent déjà les Kings et les Cheetahs. Selon SARugbymag, une Ligue celtique à 18 équipes serait à l'étude sans les Kings mais avec cinq formations sud-africaines et une géorgienne. Un format à 16 aurait néanmoins la faveur des pronostics avec seulement les Bulls, Lions, Sharks et Stormers. Exit donc les Cheetahs qui ont récemment obtenu les signatures de Frans Steyn en provenance de Montpellier et de son ancien coéquipier au MHR Ruan Pienaar. 

Du côté de l'Argentine, la fédération se démène pour trouver une compétition aux Jaguares sous peine de voir la franchise tout simplement disparaitre. "Pour être honnête, je ne sais pas vraiment ce qui va se passer si les Jaguares ne participent pas au Super Rugby la saison prochaine. Certains sont peut-être partis, mais nous avons encore 35 autres joueurs sans compétition, sans club", confie Juan Manuel Leguizamon au Telegraph. La grande partie des joueurs actuels des Jaguares évoluaient avant au sein des Pampas XV, engagé dans le championnat local sud-africain, la Vodacom Cup. On est loin du Super Rugby et de ces matchs avec des internationaux à presque tous les postes. Alors quelle alternative ? Le Top 14 peut-il accueillir les Jaguares ? La connexion entre les deux pays est forte. Mais la logistique semble impossible à mettre en place pour voir cette idée se réaliser. "Ajouter les Jaguares au Top 14 pourrait finir par être un cauchemar administratif. Mais abandonner l'Argentine à ce stade est impardonnable", écrit le journal anglais. Et si les internationaux ne peuvent pas jouer, ce sont les Pumas qui vont en pâtir. 

Alors oui, la Fédération argentine a fait machine arrière en permettant aux "étrangers" d'être sélectionnés. Mais tous n'auront peut-être pas la chance d'évoluer dans un grand championnat et d'évoluer au plus haut niveau européen. Avec les Jaguares, ils pouvaient non seulement se frotter à quelques-uns des meilleurs joueurs de la planète, mais surtout vivre toute l'année en groupe, peaufiner leurs automatismes et grandir ensemble. Un avantage énorme au niveau international quand on sait que certaines nations ne disposent que de quelques semaines voire jours de rassemblement avant de jouer des matchs internationaux.

Certes, les Pumas n'ont jamais fait mieux que la troisième place dans le Rugby Championship depuis leur intégration au Tri Nations en 2012. Mais on peut lier certaines de leurs performances au niveau international à l'existence des Jaguares. En 2016, la sélection argentine s'est offerte les Springboks pour la première fois de son histoire puis elle les a rebattus en 2018. Cette année-là, les Argentins faisaient coup double en battant les Wallabies devant leur public. Une première historique. Les Pumas n'ont jamais battu les All Blacks mais après la finale des Jaguares en Super Rugby, ils ont tenu la dragée haute aux doubles champions du monde l'an passé, 16 à 20, du côté de Buenos Aires. Des résultats qui pourraient très rapidement devenir de l'histoire ancienne avec la disparition possible des Jaguares. 

"Le fait de ne pas avoir passé les mois précédents à jouer en Super Rugby les ramènera au statut de chair à canon, au lieu de cette sélection courageuse sur laquelle on pourrait compter pour ensanglanter le nez des Springboks et des Australiens sur les jours où ils ont baissé leur garde", estime le site sud-africain. Il n'y a même pas dix ans, les Boks infligeaient un cinglant 73 à 13 aux Pumas. Une année 2013 marquée également par un 54 à 13 des Wallabies. Le risque pour l'Argentine de redevenir une nation de second plan est réelle. D'autant plus que la patrie du Tango ne semble plus faire partie des plans de World Rugby pour développer l'ovalie dans le monde contrairement à l'Asie et à l'Amérique du Nord. Ce qui dans un sens pourrait représenter une planche de salut pour les Jaguares.OFFICIEL - La Major League Rugby annule toute la fin de saison !Aux USA, la Major League Rugby cherche à s'étendre depuis sa création en 2017. Deux équipes sont venues s'ajouter aux six déjà présentes lors de la première saison en 2018. Trois autres sont amenées à intégrer la MLR et il est aussi question d'une expansion en 2021 du côté de Hawaï. Le groupe Kanaloa Hawaii, qui lorgne aussi le Super Rugby, a déposé sa candidature en juillet dernier. Sa demande d'intégration initiale a été acceptée. Les deux parties sont donc en négociations exclusives en vue de la saison 2021. Si le projet venait à ne pas aboutir, les Jaguares pourraient en profiter. Mais ce ne se sont que des suppositions. En pendant ce temps, les Pumas se préparent - comme ils le peuvent - à jouer le Rugby Championship avec des joueurs qui n'ont pas participé au moindre match officiel depuis mars dernier.Rugby Championship - Les Pumas frappés de plein fouet par la pandémie de Covid-19